Recours contre le retrait d’une décision constatant la caducité d’une autorisation d’urbanisme : le formalisme de la notification est-il obligatoire ?
Publié le :
07/08/2023
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Selon l’article R. 600-1 du Code de l’Urbanisme, « En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l’encontre d’un certificat d’urbanisme, ou d’une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l’auteur du recours est tenu, à peine d’irrecevabilité, de notifier son recours à l’auteur de la décision et au titulaire de l’autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle concernant un certificat d’urbanisme, ou une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le présent code ».
Les dispositions de cet article sont opposables à toute personne entendant contester une autorisation d’urbanisme. Comme l’indique le texte, l’obligation de notification s’applique non seulement lors de l’introduction d’un recours contentieux, mais également dès après l’envoi d’un recours gracieux préalable à la saisine de la juridiction administrative. Dans les deux cas, et à peine d’irrecevabilité du recours juridictionnel, la notification du recours doit être effectuée par lettre recommandée avec avis de réception, dans un délai de quinze jours à compter du dépôt de la requête ou du recours.
La jurisprudence relative à l’application de cet article est nécessairement abondante : nombreux sont les justiciables qui, méconnaissant la rigueur de la règle, voient leur recours rejeter pour avoir négligé ce formalisme malheureusement essentiel. Les cas d’irrecevabilité sont d’autant plus fréquents que le juge doit soulever lui-même d’office ce moyen, lorsque l’absence de notification du recours ressort des pièces qui lui sont soumises (CE, 1er mars 2004, n°258505).
La jurisprudence illustre également les difficultés rencontrées pour délimiter le champ d’application de ce texte. Le juge administratif considère par exemple que le recours contre une décision de sursis à statuer faisant suite à une demande de permis de construire n’entre pas dans le champ d’application de l’article R. 600-1 (CAA Paris, 27 janvier 1998, n°96PA01384). En revanche, l’appel formé à l’encontre d’un jugement constatant l’existence d’une autorisation tacite de lotir doit faire l’objet d’une notification auprès du pétitionnaire et de l’auteur de la décision, en application des dispositions susvisées (CAA Bordeaux, 11 février 2008, n°05BX0419).
A travers un arrêt rendu le 12 avril 2023, le Conseil d’Etat a apporté une précision importante sur le champ d’application de l’article R. 600-1. Selon le juge administratif, lorsqu’un jugement annule une décision de l’autorité municipale constatant la caducité d’un permis de construire, l’appel formé contre ce jugement est soumis à l’obligation de notification visée à l’article R. 600-1.
Pour mémoire, l’article R 424-17 édicte une règle de péremption opposable à tout bénéficiaire d’une autorisation d’urbanisme, s’il n’a pas engagé les travaux dans un délai de trois ans à compter de sa notification ou de sa signature de la décision. Bien que le code de l’urbanisme ne le précise pas, il est possible pour l’Administration de prendre un acte constatant officiellement cette caducité, les juridictions administratives estimant d’ailleurs qu’elle a compétence liée pour ce faire : en d’autres termes, si l’autorité administrative entend prendre une décision à ce sujet, elle est tenue de constater la caducité dès lors que les conditions de la péremption sont réunies (CAA Marseille, 15 février 2000, n° 97MA00848). A vrai dire, l’adoption d’une décision formelle ne s’impose en rien, car la caducité de l’autorisation d’urbanisme est acquise de plein droit dès lors que le délai de péremption est écoulé (CE, 16 avril 1975, Ville de Louveciennes).
Mais lorsqu’une décision constatant la caducité d’un permis de construire est adoptée formellement par l’autorité compétente, il peut arriver que celle-ci la retire, à la demande du pétitionnaire, notamment lorsqu’il apparaît que les conditions de la péremption n’étaient pas acquises. Les tiers intéressés peuvent alors, s’ils le souhaitent, former recours contre la décision de retrait. Après avoir jugé, dans un premier temps, que l’obligation de notification n’était pas applicable au recours dirigé contre un acte retirant ou annulant une précédente décision de caducité (CAA Paris, 15 juin 1997, n° 96PA01188), les juridictions administratives ont par la suite adopté une position inverse (CAA Paris, 27 novembre 2001, n° 00PA00468), que vient confirmer l’arrêt du 12 avril 2023.
La solution n’est pas illogique, puisque l’annulation de la décision constatant la caducité du permis de construire fait revivre l’autorisation d’urbanisme litigieuse, de sorte que son bénéficiaire peut de nouveau s’en prévaloir à travers l’exécution ou l’engagement de travaux. D’où l’importance de l’aviser, ainsi que l’auteur de la décision, de l’existence d’une contestation. Sur ce point, l’évolution de la jurisprudence est peut-être plus en accord avec la nouvelle rédaction de l’article R 600-1, résultant du décret du 17 juillet 2018 : alors que dans sa précédente version, l’obligation de notification visait exclusivement les recours à l’encontre « d’un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir », le champ d’application de la règle est désormais plus large et plus général, puisque sont visés, outre les certificats d’urbanisme, les décisions relatives à l’occupation ou à l’utilisation du sol, dans leur globalité.
François ROBBE
Avocat associé
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